Connu dans différents secteurs d’activité comme une solution gagnante, le portage salarial en immobilier est encore un sujet à controverse.
En effet, tandis que certains professionnels effectuent des recours relatifs à la légalisation, d’autres se montrent plutôt réticents.
Cette attitude se justifie en partie par l’ambiguïté qui plane sur le sujet quant à la décision du législateur, et notamment par la sensibilité du domaine immobilier.
Dans cet article, avant d’aborder les potentiels avantages et inconvénients du portage salarial en immobilier, nous répondrons d’abord à la question de la légalité de cette pratique pour le mandataire.
Qu’est-ce que le portage salarial en immobilier ?
Avant de dire si oui ou non le portage salarial en immobilier est légal, il convient de connaître la définition de ce concept. Il s’agit d’une forme d’emploi hybride qui combine certains avantages du statut de salarié et d’indépendant.
Il a été intégré dans le Code du travail français le 25 juin 2008 et est réglementé par un seul syndicat depuis 2012. Cette forme d’emploi s’est rapidement développée dans de nombreux secteurs d’activités, se présentant comme un pont entre le salariat et l’entrepreneuriat.
Dans le secteur immobilier, le portage salarial est un type de relation contractuelle spécifique qui lie un négociateur immobilier indépendant en tant que salarié porté, une société de portage immobilier ainsi qu’une agence immobilière, un promoteur ou un réseau.
Dans cette relation tripartite, le mandataire indépendant effectue une prestation pour l’agence immobilière tout en étant salarié l’entreprise de portage.
Cette dernière s’occupe pour lui des aspects administratifs tels que la facturation de ses prestations.
Elle n’intervient donc en aucun cas dans la gestion du planning, de la clientèle, ni des négociations. Ce mode d’organisation offre donc de multiples avantages, notamment en termes de flexibilité et de sécurité.
Pourquoi ce mode d’organisation du travail n’est pas légal en immobilier ?
Le portage salarial a été conçu à l’origine pour des missions ponctuelles, mais son utilisation dans le secteur de l’immobilier pose des problèmes.
Contrairement à d’autres missions, les activités immobilières ont souvent un objectif économique plutôt qu’un objectif social. Par rapport à la loi Hoguet, la légalité n’est pas claire. Ces détails peuvent donc poser des problèmes en termes de respect des obligations légales envers les salariés.
Par ailleurs, en immobilier, l’utilisation de ce mode d’organisation permet aux agences de trouver plus facilement des agents commerciaux désireux d’être salariés, tout en offrant des avantages pour l’agence et le négociateur.
Si l’agent commercial génère suffisamment de chiffres d’affaires, il sera payé par la société de portage salarial sous forme de salaire. En revanche, si l’agent commercial ne réalise pas suffisamment d’affaires, l’agence n’a pas à le rémunérer conformément à son contrat avec la société.
Dans ce cas, l’agent commercial ne touche pas le SMIC, ce qui est contraire au Code du travail et peut entraîner une action prud’homale.
Par conséquent, pour protéger aussi bien les agences que les travailleurs indépendants, le législateur français s’est longtemps montré hostile à la légalisation de ce mode de rémunération en immobilier.
Toutefois, si une entreprise est tentée de recourir à ce mode de rémunération pour éviter de payer le SMIC, elle doit être consciente du fait que cela pourrait entraîner des risques juridiques.
La légalité du portage salarial en immobilier
Le secteur de l’immobilier est régi en France par la loi Hoguet depuis 1970, bien avant l’apparition du concept de portage salarial dans les années 1980.
Plus tard dans les années 2000, le portage a connu un tel succès qu’en 2012, le secteur est finalement réglementé par un syndicat unique appelé PEPS (Professionnels de l’emploi en portage salarial).
Depuis lors, la réglementation n’a cessé d’évoluer, avec notamment l’extension de l’accord du 24 juin 2010 pour améliorer son encadrement.
L’ordonnance du 2 avril 2015 et son décret d’application du 30 décembre 2015 ont également fixé les conditions d’exercice de l’activité en sécurisant davantage le parcours professionnel des travailleurs portés.
Cette réglementation reconnaît l’importance croissante de ce nouveau mode de rémunération dans un marché du travail dynamique.
Une incompatibilité avec la loi Hoguet
En effet, la législation en vigueur permet d’exercer les métiers de l’immobilier sous portage salarial depuis juillet 2015, mais la loi Hoguet exige que tout agent possède une carte professionnelle prouvant ses compétences dans le domaine, quel que soit son statut.
Trois types de cartes sont délivrés pour les différentes tâches :
- La carte T pour les transactions ;
- La carte G pour la gestion locative ;
- La carte S pour les syndics de copropriété.
Depuis juillet 2015, les salariés portés doivent se procurer leur carte auprès de la Chambre du Commerce et de l’Industrie. À défaut, l’habilitation de la société peut être utilisée, à condition que les documents fournis portent le numéro et le lieu de délivrance.
Ainsi, si pour certains professionnels de l’immobilier, la question de la légalité est un sujet délicat et controversé, du fait que cela peut être considéré comme une forme de travail dissimulé, pour d’autres, cela apparaît plutôt comme une opportunité.
En effet, le portage salarial en immobilier peut constituer une forme de travail qui s’adapte aux défis économiques actuels en transformant les commissions payées au négociateur immobilier en salaires nets.
Enfin, le code du travail prévoit que la seule activité qu’une entreprise en portage salarial peut exercer est celle-ci. Ce qui exclu donc d’autres métiers, et en particulier l’entremise immobilière.
Comment fonctionne le système ?
Le portage salarial en immobilier est une relation contractuelle à trois parties, qui implique un professionnel indépendant, une entreprise cliente (agence, réseau immobilier ou promoteur) et une société de portage.
En effet, ce contrat requiert la signature de quatre documents importants pour assurer la sécurité de toutes les parties impliquées. Tout d’abord, la convention d’adhésion est signée entre le salarié et la société, reprenant les éléments discutés avec le commercial en amont.
Ensuite, il y a la lettre de mission qui formalise l’acte. Enfin, il faudra apposer sa signature sur le contrat commercial de prestation, également appelé bon de commande.
Le contrat de prestation est un document signé par une structure immobilière et une société.
Il encadre les obligations de chaque partie, les modalités financières et les conditions de la mission. La société adresse ensuite les factures des commissions du professionnel indépendant à son entreprise cliente à la fin de la mission.
Entre le consultant indépendant et la société de portage
Le professionnel indépendant peut signer un CDD ou un CDI avec une société de portage salarial et s’engager à effectuer des missions pour l’entreprise cliente.
Elle facture alors ses prestations en son nom puis encaisse ses commissions qu’elle transforme en salaire net qui lui est versé régulièrement. La société de portage gère également les frais professionnels, produit les bulletins de paie et règle les charges sociales.
Entre l’agence et le salarié porté
Ce mode de rémunération en immobilier établit une relation tripartite entre le professionnel indépendant, la société de portage salarial et la structure immobilière cliente.
Le premier signe une convention avec la société de portage salarial immobilier et un contrat de travail. Il est alors chargé d’effectuer les missions définies par l’entreprise cliente.
La deuxième s’occupe de la facturation, l’encaissement des commissions et la transformation en salaire net, la gestion des frais professionnels, des bulletins de paie et des charges sociales.
De son côté, l’entreprise cliente et le professionnel indépendant conviennent des conditions du travail à travers une lettre de mission contractuelle.
Entre la société de portage et l’agence immobilière
Le contrat de prestation est un document signé par l’agence, le réseau ou le promoteur immobilier et la société de portage salarial en immobilier.
Ce document encadre les obligations de chaque partie, les modalités financières et les conditions de la mission. Elle facture ensuite les commissions à l’entreprise cliente à la fin de la mission.
Les avantages du portage salarial en immobilier
Avec ce mode de rémunération, les négociateurs bénéficient du statut de salarié en fonction des ventes facturées, offrant une meilleure sécurité sociale, des indemnités de chômage et des régimes de retraite.
En ce qui concerne les agences et les réseaux immobiliers, ils paient une facture correspondant aux honoraires du mandataire et la société de portage salarial reverse un salaire au négociateur, sans frais pour l’agence ou le réseau immobiliers.
Le recours garantit également une tranquillité d’esprit, car la société gère toutes les tâches courantes, permettant au négociateur de se concentrer sur son travail.
Quels sont les inconvénients du portage salarial en immobilier
En effet, malgré ses avantages, le portage salarial en immobilier peut présenter des inconvénients et des risques pour les négociateurs et les agences immobilières.
D’une part, si un agent ne signe pas suffisamment de mandats avec son agence, le salaire versé par la société de portage peut ne pas respecter le salaire minimum légal.
D’autre part, la réglementation impose que le salarié porté dispose d’une attestation collaborateur émanant de son employeur, en l’occurrence la société, ainsi qu’une autre carte professionnelle pour exercer légalement en tant qu’agent immobilier.
Cela rend le portage salarial incompatible avec l’activité immobilière, sauf si des solutions sont trouvées pour respecter les exigences légales en vigueur.
Comment calculer le salaire ?
Le salaire en portage salarial immobilier est calculé en fonction du chiffre d’affaires généré par le salarié porté qui correspond aux commissions hors-taxe négociées lors des transactions immobilières. Ce chiffre d’affaires est ensuite soumis à des déductions, notamment :
- Le coût de gestion de la société (5 à 12 %) ;
- Les charges salariales (20 à 22 % sur le salaire brut) ;
- Les frais professionnels (jusqu’à 30 %) ;
- Les déductions patronales (43 à 48 % sur le salaire brut)…
Le salaire net est finalement obtenu en soustrayant ces déductions du chiffre d’affaires et en ajoutant les frais professionnels remboursés qui représentent 45 à 50 % de la facturation hors-taxes en fonction du montant des frais.
De tout ce qui précède, retenez qu’effectivement, le recours au portage salarial dans l’immobilier est souvent considéré comme complexe et soumis à de strictes exigences légales.
Toutefois, des efforts sont en cours pour rendre cette pratique compatible avec l’activité immobilière et garantir sa conformité aux réglementations.
Des questions importantes ont été soulevées et des précédents juridiques commencent à émerger, ce qui pourrait influencer l’application de la loi sur le portage salarial dans le secteur immobilier.
Enfin, faites attention aux sociétés de portage qui recrutent des agents pour leur propre réseau de mandataires.